Mon histoire d’écriture n’est pas que mon histoire. C’est une histoire à trois. Trois potes, trois plumes qui s’aiguisent depuis quarante et quelques années. Il y a d’abord eu Raphaël Guillet, rencontré à l’université, puis Claude Bonvin, connu au bistrot comme il se doit. On avait vingt-et-un, vingt-deux… On voulait faire un Charlie Hebdo romand, on l’aurait appelé Le Joufflu ! On voulait écrire contre la connerie ambiante, contre les petites gens bien comme il faut, les mesquins et les mesquines, les gros lourds et les pétasses, les ambitieux arrogants et les chefs sans âme, les artistes replets et complaisants, les politiciens rêvant de devenir aussi gros que le boeuf, contre les banquiers qu’on ne connaissait pas. On voulait juste s’amuser, regarder les jolies filles passer devant nos yeux, écrire comme Romain Gary, penser comme Albert Camus, s’engager comme Robert Badinter. On voulait vivre à mach 2. On n’avait pas un sou. On livrait des limonades, de la bière, du vin sous le regard bienveillant de la famille Déjardin. Pour payer nos études qui ne nous poursuivaient pas beaucoup… Quarante ans après, le Joufflu existe toujours. Le Matin Dimanche du 27 novembre 2022 vient de saluer l’un de ses pères : Raphaël. Faites connaissance avec lui et son héroïne, l’impétueuse Alice Ginier. Une commissaire comac ! Ah… à côté il y a un procureur de la république de Neuchâtel. Une autre histoire.